L’ascension de Jésus-Christ, une présence nouvelle

© Anaïk Simon

Les deux récits de l’Ascension proposés par les évangélistes Luc et Marc racontent un événement qui nous met au centre de deux mouvements d’une grande ampleur, deux élans apparemment divergents mais pleinement dépendants l’un de l’autre. Les apôtres assistent au départ de Jésus-Christ « élevé » vers le ciel et eux-mêmes sont aussitôt incités à partir « proclamer partout l’Évangile », « jusqu’aux extrémités de la terre ».

Tandis que le Père « élève » Jésus mort et ressuscité auprès de lui pour le faire entrer dans sa gloire, le temps et l’espace du témoignage apostolique s’ouvrent au monde. Mais avant d’être « enlevé au ciel », Jésus a pris le temps de venir retrouver les apôtres, pour leur donner ses instructions, « leur parler du Royaume de Dieu ». Il a pris le temps de les aider à comprendre ce qui était arrivé, de les encourager pour s’engager dans une mission qui s’annonce pour le moins ardue. Ce n’est quand même pas si simple de quitter pour un temps indéfini sa famille, son travail, son pays, s’en aller dans le monde entier et poursuivre la mission du Christ ! Car il ne s’agit pas d’autre chose en effet : témoigner des paroles et des gestes de Jésus durant toute sa vie publique pour poursuivre et réaliser son œuvre de salut, ouvrir le chemin du Royaume pour tous les hommes. Témoigner de la Bonne Nouvelle par toute la terre, c’est inscrire ses pas dans ceux du Christ : expulser les démons, parler en langues nouvelles, apaiser la violence du poison, imposer les mains aux malades pour les guérir, veiller sans relâche à la dignité et au bien de tout homme. La prédication des Apôtres va prendre sa source dans l’existence même de Jésus. Il en faut de l’audace et de la « prise de risque » comme on dirait aujourd’hui, pour entreprendre cette tâche immense, alors que le Maître a disparu, laissant toute leur responsabilité d’apôtre à ceux qu’il a d’abord choisis, puis instruits !

Mais l’Ascension du Christ n’est pas tant une disparition, qu’un passage, une transition vers une présence nouvelle, plus intense, universelle et de tous les temps. Car il y a continuité annoncée entre Jésus et les apôtres par la venue de l’Esprit Saint. Jésus n’abandonne pas ceux qui l’ont suivi fidèlement au long des routes de Galilée ; après un temps de préparation de « quarante jours » nous dit Luc, il les assure d’une promesse fondamentale et unique : « Vous allez recevoir une force quand le Saint Esprit viendra sur vous ». L’annonce de l’Évangile va être impulsée par le don de l’Esprit à la Pentecôte.

C’est la même promesse qui accompagne la vie missionnaire de l’Église jusqu’à son terme depuis l’enlèvement du Christ auprès du Père. Cette même promesse qui nous relie au Christ nous relie entre croyants. Quand nous sommes tentés de « rester là à regarder vers le ciel » et quand nous sommes découragés ou fatigués « de proclamer partout l’Évangile », il est bon de s’épauler entre frères et sœurs pour faire circuler la force de l’Esprit. « Chercher Dieu d’un cœur sincère […] nous aide à nous reconnaître comme des compagnons de route, vraiment frères »[1].

Anne Lemoine