Témoignage, Bernadette professeur d’allemand et paroissienne
En cette fin d’année scolaire, Bernadette, professeur d’allemand et paroissienne, témoigne sur les conséquences positives et négatives de la covid dans la profession d’enseignante.
Covid, confinement : Que ces deux mots nous ont bousculés depuis l’année 2020 !Comme nous nous sommes sentis dépassés, mal armés face à cette pandémie ! Enseignante depuis plus de 40 ans et directrice des études de 6e et 5e depuis janvier 2014, voici selon moi les conséquences positives et négatives de la covid dans ma profession.
Les conséquences négatives d’abord :
Sentiment d’insécurité, des enfants touchés par des deuils familiaux, des gestes barrière à intégrer, l’impression pour les enfants que mêmes les adultes étaient démunis au départ, des tensions, des détresses psychologiques, des parents comme des enfants, parfois, lorsque le télétravail devenait oppressant, le partage des outils informatiques, le fait de se retrouver seul devant son travail, la tentation de ne pas le faire malgré les relances des parents et des enseignants.
Le pire a sans doute été le manque d’interaction, le manque de vrais échanges dialogués, à voix haute, nécessaires à toute vie humaine, avec les copains, avec les enseignants pour le côté scolaire. Le manque d’activités physiques ou artistiques régulières en club a généré d’autres problèmes de dépendance aux jeux, au téléphone, aux réseaux sociaux. Ces derniers perdurent malheureusement, les plus jeunes qui n’ont pourtant pas l’âge légal de 13 ans pour être sur les réseaux Tiktok, Snapchat, Instagram, Whatsapp, … mais qui y sont quand même, ont pris l’habitude de tout dire, de s’épancher à tout propos (les fameuses stories) et cela monte très vite en épingle et peut virer rapidement aux insultes, aux exclusions, au harcèlement. C’est un enjeu pour les parents de leur faire prendre conscience de ce danger.
L’interaction a énormément manqué aux enseignants également pendant le confinement : on ne fait pas les mêmes choses à distance et en présentiel, les différences se sont accrues, certains élèves ont décroché par manque de suivi, de motivation, d’outils et il a été difficile de les « rattraper ». Des lacunes perdurent encore et il faudra du temps et beaucoup de volonté pour les effacer et arriver à des groupes moins hétérogènes.
L’enseignement des langues a été plus compliqué, difficile d’apprendre l’intonation, la prononciation, la répartie spontanée quand on n’est pas en présentiel et encore, heureux sommes nous d’avoir des outils audio, vidéo à disposition.
Les conséquences positives :
Beaucoup d’élèves ont appris l’autonomie dans leur travail, certains ont vraiment pris du plaisir à prendre en main leur travail, à se voir progresser. D’autres, timides, ont pris de l’assurance et osé poser des questions à leurs enseignants, ce qu’ils n’auraient pas forcément fait en classe et c’est une bonne chose parce qu’ils ont souvent continué ensuite à le faire.
La Pastorale a continué à envoyer des messages de soutien et d’espoir.
Élèves et enseignants ont aussi progressé dans la maîtrise de l’outil informatique. Grâce au Département, nous avons pu prêter 21 ordinateurs à des élèves en besoin, repérés lors du précédent confinement et cela a permis d’avoir moins de décrocheurs. Le suivi a été mieux assuré avec des personnes référentes, des séances de sophrologie ont même été proposées par l’infirmière scolaire. Les enseignants ont trouvé de nouvelles façons de faire, d’expliquer. Les documentalistes aussi ont vraiment pris part à l’animation scolaire et continuent à encourager les élèves à l’imagination (panneaux, concours, etc…). Les enseignants disent avoir redécouvert à quel point la transmission en vis-à-vis et l’interaction sont le véritable cœur du métier.
Les élèves osent davantage demander à leurs enseignants en cas de soucis, les rapports ont évolué. La communication entre enseignants a été et est toujours très forte : partage d’expériences et de méthodes.
Au moment de la rentrée en présentiel, les enseignants ont montré leur bonheur de retrouver les élèves. Difficile de porter un masque : parler demande plus d’efforts, ne plus voir le sourire des élèves, ne plus voir leurs expressions et réciproquement, cela a modifié nos codes mais l’essentiel est d’avoir réussi à évoluer, à nous adapter.
Bousculés, oui, mais cela a permis d’autres découvertes, d’autres relations en famille ou dans le travail, beaucoup ont « cultivé » leur jardin, dans tous les sens du terme et il faut garder la volonté de bien remettre les élèves sur la voie du travail, source d’épanouissement et d’autonomie, et surtout garder le sourire pour le jour où nous pourrons enlever les masques !
Bernadette Lebel